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EN n°47 > La taupe

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Article du "Journal du Palais" | La taupe | Recette d'Andrée

La taupe

Tout le monde a souvent vu, dans son jardin ou dans un pré, s'élever ce petit tas de terre que l'on appelle " taupinière " et quel est le jardinier qui n'a pas maudit la bête qui, en une nuit, a soulevé la terre de son semis de salades. Moins nombreux sont ceux qui ont vu une taupe vivante, l'ont prise dans leurs mains et ont caressé son pelage si doux et incroyablement propre. Mais quels sont ceux d'entre nous qui connaissent les moeurs et les habitudes de cet animal discret et pourtant si familier ?


La main de la taupe

Pourtant, dès que l'on commence à s'intéresser à cette petite bête, on se rend compte quels trésors d'habileté elle a dû mettre en oeuvre pour survivre dans un monde de moins en moins fait pour elle.
En effet, la taupe est, à l'origine, un animal adapté à la vie dans les bois. La déforestation intense qui a caractérisé la prolifération des hommes en Europe au cours des 20 derniers siècles l'a obligée à s'habituer à vivre dans d'autres types de paysages.
Il est intéressant d'ailleurs de voir l'évolution des sentiments que l'homme porte à cet animal. Longtemps considérée comme nuisible à cause des taupinières, on croyait alors qu'elle mangeait les racines et détruisait les plantes : ce crime était puni de la peine de mort. Au18ème siècle, on observe qu'elle se nourrit essentiellement de vers de terre et devient alors un animal utile qu'il faut protéger. Mais au 19ème siècle, les zoologues et les agronomes se rendent compte du rôle essentiel que jouent les vers de terre dans la fabrication de l'humus et dans l'ameublissement des sols : le ver de terre devenant un animal utile, la taupe " a contrario " redevient un animal nuisible. De plus, dans les années 1920-30, la mode des manteaux en peaux de taupe fut lancée. Comme il fallait de 600 à 800 peaux pour fabriquer un seul manteau, l'espèce faillit être exterminée (au début, certains piégeurs arrivaient à en tuer jusqu'à 8000 par an !). Heureusement, cette mode ne dura pas très longtemps et, vers 1960, les derniers piégeurs cessèrent leur activité.
La taupe est un petit animal de 14 centimètres de longueur, sa queue, elle, mesure environ 3 cm. La femelle est un peu plus petite que le mâle. Le museau est long et pointu; les yeux, minuscules, sont cachés dans le pelage et les oreilles externes ne sont qu'un simple repli. De longs poils tactiles entourent la tête et le museau. La fourrure veloutée, gris foncé ou presque noire est rase, serrée et très fine. Elle offre la particularité d'être plantée perpendiculairement à l'épiderme ce qui fait qu'elle n'est jamais " à rebrousse poil " quand l'animal doit faire marche arrière dans une galerie.
Ce qu'elle a de plus étonnant c'est quand même sa "main", transformée en pelle d'une efficacité redoutable pour ses travaux de terrassements. Cet outil ressemble étrangement à une main humaine, armée de griffes redoutables, mais le reste du membre est enfoncé dans le corps : seule la main émerge de la fourrure.
Si la taupe est presque aveugle, elle entend parfaitement le moindre bruit qui se répercute et s'amplifie dans les galeries mais surtout ressent toutes les vibrations du sol, qu'elles soient provoquées par des pas à la surface ou par un animal qui bouge près d'elle. Les longs poils tactiles qui entourent son museau sont les organes récepteurs principaux.
Sa vie (une taupe vit en moyenne trois à quatre ans) est partagée en deux : les périodes de chasse et les périodes de sommeil; 4 heures de chasse suivies de quatre heures de sommeil. La taupe est uniquement carnivore. Pour chasser, elle parcourt ses galeries à grande vitesse, 1 m par seconde soit 3,6 km/ h ce qui est considérable et dévore tout ce qu'elle rencontre : vers de terre évidemment, mais aussi carabes, vers blancs, chenilles et chrysalides, courtilières, mille-pattes. Si la terre est riche, les 250 m de galeries qu'elle " possède " suffisent pour la rassasier. Ces galeries forment un labyrinthe, un réseau en forme de toile d'araignée qui piège systématiquement tout animal passant par là. Elle n'éprouve alors pas le besoin de creuser des galeries supplémentaires et pendant des mois ou même des années, elle peut vaquer à ses occupations sans signaler sa présence à l'extérieur. (Donc dire : je ne vois pas de taupinière, c'est qu'il n'y a pas de taupe, est une erreur. )
Si cette méthode n'est pas suffisante pour se nourrir, la taupe utilise une seconde manière de chasser : elle parcourt beaucoup plus lentement ses galeries et " écoute " toute vibration provoquée par un animal qui creuse à proximité. Il lui suffit alors de creuser sur quelques centimètres pour " cueillir " sa proie. Elle tire tout d'abord sur le ver pour le faire venir en entier dans la galerie puis elle le coince avec ses pattes et le porte à sa bouche par l'extrémité qui gigote le plus (en général la tête). Elle le déguste par petits tronçons. Le fait que le ver est coincé entre deux doigts lui permet de le vider de la terre qu'il contient et qu'elle n'ingère pas. En quelques secondes la bête est avalée et la chasse peut reprendre.
Si cette seconde méthode n'a pas été efficace, il ne lui reste plus que la troisième : creuser une nouvelle galerie pour allonger son territoire de chasse. C'est alors que vous verrez apparaître des taupinières. En effet, la terre de déblai doit être évacuée. D'abord la taupe va la repousser vers des parties de galeries qui ne sont plus " rentables ", puis elle creuse une galerie verticale qui aboutit à la surface. Elle pousse une quantité de terre égale à 10 fois son poids. Pour cela elle plante ses pattes arrières dans la paroi et se sert des pattes avant comme d'un bouclier entre la terre et sa tête. D'un coup de rein, elle fait avancer la charge de quelques centimètres puis prend un nouvel appui pour avancer de nouveau (les piliers de rugby utilisent la même méthode).


La taupe dans sa galerie

Les galeries creusées par la taupe s'étalent sur plusieurs niveaux : un réseau de surface au ras du sol, facile à creuser mais souvent éboulé, (c'est celui-là que redoutent les jardiniers), un réseau moyen à 10 ou 15 cm de profondeur et un réseau profond souvent à 50 cm sous le sol. Les réseaux profonds posent un grave problème de ventilation En effet; la taupe, comme tous les mammifères respire par des poumons. Or l'air de ces galeries est très vicié : 6 à 16% d'oxygène au lieu des 21 % réglementaires et 10 à 55 fois plus de gaz carbonique que dans l'air normal. Heureusement la taupe possède un appareil respiratoire extraordinaire : des poumons gigantesques, deux fois plus gros que pour les autres animaux, une quantité de sang énorme : 8% du poids du corps au lieu de 4% chez le campagnol, par exemple. De plus, ce sang contient une quantité d'hémoglobine double de celle des autres animaux (seul le lama qui vit dans l'air raréfié des Andes en possède autant). Enfin la terre meuble des taupinières ainsi que quelques
évents soigneusement cachés dans une touffe d'herbe laissent circuler quelques courants d'air bien agréables dans les galeries. La taupe gère continuellement cette aération en fonction du climat extérieur et de ses besoins en oxygène. C'est pour cela que, dès que le jardinier a démoli une taupinière et tassé la terre tout autour, elle remonte à la surface pour rétablir cette aération.
Les taupes sont des animaux solitaires. Chacune, mâle ou femelle possède un réseau de galeries qu'elle défend jalousement. Mais à la fin de l'hiver, les femelles sont en chaleur et les mâles quittent leur territoire pour les rejoindre en creusant à toute vitesse une galerie, parfois même en courant sur le sol. Ils quittent la femelle dès qu'elle est fécondée et rejoignent leur territoire. Les petits naissent fin Avril dans un nid bourré de feuilles sèches et profondément enfoui. Les quatre petits sont rouge vif à la naissance et vont changer de couleur, roses, gris ardoise puis noirs en quelques semaines. Ils vont aussi grossir très vite, passant de 3,5 g à la naissance à 60 g en 3 semaines (imaginez un bébé pesant 3,5 kg à la naissance et qui ferait 60 kg au bout de 21 jours!). Mais la nourriture est abondante à cette période de l'année et la mère n'a pas trop de peine à leur fournir un lait particulièrement riche.
Les petits vont vivre avec la mère encore un mois, puis elle les chasse car la nourriture devient insuffisante pour 5. Les jeunes montent à la surface et partent à la recherche d'un territoire. Ils sont alors très vulnérables et la plupart périssent sous le bec d'une chouette ou la dent d'un renard. L'idéal pour eux est de trouver un réseau de galeries abandonné par une taupe décédée car si l'occupant est toujours là, une furieuse bataille s'engage et le jeune est en général chassé.
L'hiver, la taupe n'hiberne pas, elle n'a aucune réserve de graisse qui lui permettrait d'attendre des jours meilleurs. Comment alors se nourrir quand la terre est gelée et que les insectes sont engourdis par le froid? Aucun problème : la taupe a inventé la conserve.
Pendant les pluies d'automne, lorsque les vers de terre pullulent, la taupe en trouve beaucoup plus qu'elle ne peut en manger. Elle continue cependant à les chasser, mais, d'un coup de dent elle leur coupe la tête. Les vers ne peuvent plus bouger et se roulent en boule. Elle les stocke ainsi dans des cachettes près de son nid. Un savant a ainsi trouvé un "garde-manger" rempli de 1280 lombrics emmêlés les uns avec les autres. Mais en général elle multiplie les petites cachettes contenant chacune quelques vers. Si elle ne trouve rien à manger, elle a ainsi une réserve de nourriture. Et les vers de terre me direz-vous? Si le printemps arrive et qu'ils n'ont pas été dévorés, une tête leur repousse. Ils peuvent alors creuser une galerie et s'échapper.
Il ne reste plus à la taupe qu'à creuser un nouveau nid car l'ancien est infesté de puces et d'acariens. Ce nouveau nid est presque toujours construit près de l'ancien. C'est ainsi que, en comptant ses nids successifs, on peut déterminer facilement son âge.
La taupe ne vit pas vieille. Elle meurt en général d'inanition. En effet ses dents très pointues ne repoussent pas et s'usent très vite en raison des grains de sable contenus dans les lombrics. Un jour vient où elle ne peut plus les mâcher. Ses galeries patiemment construites ne seront pas perdues pour tout le monde : un jeune ou un voisin va aussitôt les occuper. C'est pour cela que le jardinier ne comprend pas pourquoi, après avoir tué une taupe, il voit rapidement émerger de nouvelles taupinières.

Bernard

Sources : "La Hulotte" et
"L'encyclopédie universelle des animaux"
 

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