Association Entre-Nous



Accueil

Journal

Archives
Equipe

E-mail
Livre d'or
Forum

Photos
10 ans

Cassette vidéo
Abonnement

Bric-à-brac
Aide

nb de visiteurs

Chercher sur le site
 

   
EN n°47 > Rites et traditions de chez nous

Bravos | Rubrique à brac | Edito | Dictons | Photos
Proverbes occitans | Poésie | Rites et traditions | Soirées estivales
Article du "Journal du Palais" | La taupe | Recette d'Andrée

Rites et traditions de chez nous

L'été s'est installé et les gros travaux agricoles vont bon train.

FENAISON ET MOISSON

Aux XVII et XVIII èmes siècles (et après), on récolte luzerne, blé, seigle, avoine, orge, paumelle, et même la mixture, appelée aussi méteil, qui est un mélange de blé et de seigle. On cultive aussi fèves, vesces, lin, chanvre, arbres fruitiers (dont le mûrier)... Le maïs apparaît dans notre région vers 1640.
"A la Magdalena, l'avelana es plena, lo rasin variat e lo blat rengat" (A la Sainte Madeleine (22/07), la noisette est pleine, le raisin change de couleur et le blé est rangé) indique un dicton.
En effet, la fenaison et la moisson sont sensées apporter le fruit des efforts consentis. Tout le monde est mobilisé. Les hommes, par groupes, fauchent les céréales à la faucille et l'un d'entre eux lie les gerbes à la main. Les femmes comme les enfants.les entassent en piles (los tabels) Une fois transportées sur l'aire de battage (lo sol), ces gerbes sont battues à l'aide d'un fléau (lo flagèl). Puis le grain est ventilé et passé au crible. La mécanisation ne s'impose guère que dans la moitié de ce siècle-ci.
"Fa pas bon trabalhar quand la cigala canta" (Il ne fait pas bon travailler quand la cigale chante). Pourtant, la journée débute avec le lever du soleil et le travail est pénible sous la canicule (lo calimas), même si l'on s'octroie quelques pauses comme le repas pris au champ." En canicule, beau temps, bon an" : entre le 22 juillet et le 22 août, se lève l'étoile la plus brillante de la constellation du Grand chien qui s'appelle Canicula ou Sirius. D'où le nom donné aux fortes chaleurs.
Traditionnellement, chaque campagne commence par une messe et une bénédiction et se termine par un dernier chargement garni d' un bouquet de fleurs . Bien sûr, est organisé un joyeux repas final au cours duquel on chante et on s'amuse. D'ailleurs, l'été est jalonné de fêtes votives célébrées en l'honneur des patrons des paroisses. Dans la société de nos encêtres, la vota (dédiée à Saint Théodard, début mai, à Villebrumier) revêt une grande importance . Elle procure l'occasion de réunir toute la parenté pour partager le pot au feu à la viande de boeuf , boire le café ou savourer l'odorant massepain cuit dans le four du boulanger. On danse le soir sur la place faiblement éclairée avec des falots.et le lendemain matin on assiste à la messe dédiée aux morts.
"Quand plèu per Sent Laurenç, la pluèja ven plan a temps" (Quand il pleut pour Saint Laurent (10/08), la pluie arrive bien à temps).ou encore" Pluie de la Saint Michel (29/09) ne demeure jamais au ciel).
Malheureusement, parfois, les aléas climatiques ternissent la bonne humeur. Ainsi, la sécheresse est souvent bien marquée dans notre région. Un chroniqueur note qu'en 1623" de la Saint Jean à la Toussaint, l'eau a été plus rare que le vin" et en 1718 on signale que" les hommes sont obligés de faire tourner eux mêmes les meules de leur moulin à eau" .

LA FÊTE NATIONALE

Depuis 1879, le 14 juillet est reconnu comme Fête Nationale et la "Marseillaise" est rétablie comme hymne national. La République est symbolisée par le buste de Marianne coiffée d'un bonnet phrygien qui n'apparaît dans les mairies que vers 1877. Ce nom trouverait son origine du temps du Directoire quand l'un de ses membres, Barras, aurait confié à propos du prénom Marie Anne porté par une charmente dame: " est simple et bref, il sied à la République autant qu'il sied à vous même". Ce surnom aurait ainsi été repris au cours des décennies qui ont suivi par des sociétés politiques secrètes pour s'imposer officiellement enfin.
Les premières célébrations de la Fête Nationale sont calquées sur les rites religieux Mais l'esprit de revanche provoqué par la défaite de 1870 développe bientôt un état d'esprit patriotique. Marianne est alors exposée au balcon de chaque mairie drapée de tricolore. Les écoliers participent au défilé et les édiles prononcent des discours pathétiques. Un bal et même parfois un feu d'artifice cloturent cette manifestation populaire.
Il y a quelques décennies encore, à Villebrumier même, on organisait un repas convivial devant la mairie et à cette occasion on pouvait manger du fromage ( du cantal, sans doute!) avec du pain et boire du vin tiré d'un fût... Sur la façade de leur brigade, stuée dans l'actuelle rue Gambetta, les Gendarmes avaient dessiné à l'aide de luminions tricolores les lettres R F.

FÊTES A REPETITION

On fête la Vierge le 15 aôut, jour de l'Assomption, avec foi, faste et ferveur. Le lendemain, pour la Saint Roch, on bénit les animaux sur le parvis de l'église dans l'espoir de les protéger.
Au fil de l'an, on implore bien des saints dont certains ont une spécialité, et il en existe toujours un qui guérit quand on le prie. Ainsi, Saint Pierre est le patron des serruriers et Sainte Cécile des musiciens. Sainte Marguerite facilite les accouchements. Saint Guy combat la chorée, une maladie nerveuse, grâce à sa fameuse danse. Saint Jean lutte contre l'épilepsie. Saint Vincent est vénéré par les vignerons et Sainte Barbe par les mineurs et les pompiers....
Et si malgré les prières la guérison ne survient pas, on a alors recours à l'endevinaire, le guérisseur qui est sensé connaître le secret des plantes mais surtout est capable de deviner les" choses cachées". A l'aide de formules ou de signes cabalistiques, souvent légués de père en fils, il détecte le besoin de prières envers un mort ou l'influence maléfique du sorcier, lo bruèis. .Ce personnage surnommé le "jeteur de sorts" ou le "mauvais oeil" , est présent dans toutes les campagnes et chaque village a le sien. Il incarne les forces du mal responsables de tous les malheurs: charrette versée, gens égarés, personne paralysée, lait qui tourne... Seul un prêtre exorciste est capable de contrecarrer ses envoûtements et une formule magique peut préserver de ses forces redoutables: "Bruèis, que lo diable t'emporta!". Pour éloigner la malédiction d'un nouveau couple, il convient que l'époux mette son pied, durant la messe, sur la robe de la mariée afin d'empécher le mauvais sort de monter. De même, le bruit et le tintamare produit par le cortège de noce protègent des mauvais esprits: la joie des invités d'une noce ne se traduit-elle pas toujours aujourd'hui par des concerts de klaxons?

RITES D'AUTOMNE

En septembre et octobre se tiennent les foires. On va y vendre le fruit des récoltes et les bêtes engraissées. On se rend à Bessières, Fronton, Monclar, Montauban et même Montastruc ou Lavaur. Il faut partir tôt " plan vestit" , bien habillé. Les plus aisés se déplacent en cariole, les autres à pied. Les bêtes suivent tant bien que mal.
Tout est à vendre et à acheter.Sous la halle, les marchands attendent avec leur grain en sache et les jardinières se tiennent près de leurs corbeilles.. Sur le foirail, les domestiques se louent pour les travaux à venir. Bovins et ovins ont la queue redressée par une corde de paille pour signifier qu'ils cherchent acquéreur. Les maquignons en blouse bleue observent. Ils concluent leurs affaires avec les éleveurs à la suite de longues discussions et une tape dans la main:" Coquin qui s'en dédie!" . Mais l'accord n'est vraiment scellé qu'après avoir trinqué. Au café, l'atmosphère est bruyante et chaude. Les hommes rentrent tard à la maison, souvent après un passage chez le barbier, une fois n'est pas coutume. On" fait la foire" , quoi. .
" A Nostra-Dama de setembre, lo rasim es bon a prendre" :cette période est aussi celle des vendanges. Le ban est annoncé par le garde-champêtre ou par le tintement des cloches. Le raisin est mûr, alors débutent des journées joyeuses mais harassantes. Le foulage s'effectue au pied, mais les femmes en sont exclues car elles risqueraient de faire tourner le vin si par cas elles avaient leur règle. Ce travail est clos par un bon repas , la paillade. On y vénère Saint Vincent (27/09).
C'est maintenant l'époque des labours. avec l'araire sans roue." Per Sent Luc, semena pauruc" (Pour la Saint Luc (18/10), sème prudemment).
" A Totsants, lo freg es pels camps" (Pour Toussaint, le froid est par les champs) Cette date marque la reprise des veillées. Il revient aux jeunes, garçons et filles, de partir en quête de farine, noix, pommes, huile, chandelles, bois, en vue de s'approvisionner pour ces soirées passées en commun, chez les uns ou chez les autres à tour de rôle dans la commune.Il arrive qu'une trentaine de personnes se retrouve autour de la cheminée monumentale (lo canton) suivant une espèce de hiérarchie: les plus âgés sous le manteau, assis sur le banquet, les autres en fonction de l'éclairage et de la tâche à accomplir. Il arrive que l'on s'installe à l'étable où la chaleur animale permet d'économiser des bûches... On s'éclaire à la chandelle. Dans sa mèche a été plantée une aiguille à repriser. Quand elle tombe, la soirée est finie. On utilise parfois une lampe à huile à trois bec, lo calel
Dans la bonne humeur, les hommes tressent ou réparent quelques paniers, les femmes filent. D'autres fois, on trie des haricots, on égrenne le maïs, on casse des noix en vue de faire de l'huile, on épluche des châtaignes... Quelqu'un lit l'almanach ou raconte une histoire...On croque pommes, noix ou chataignes. On organise des jeux , comme colin-maillard, ou des danses. TROIS JOURS IMPORTANTS :
les 1, 2 et 11 NOVEMBRE
Toussaint a remplacé l'ancienne fête celte des morts. Ce jour-là, on visite les tombes. que l'on fleurit de chrysanthèmes. Les 1er et 2 novembre, jour des Morts, il est formellement interdit de s'amuser, de travailler, de faire la lessive (par déférence au linceul des défunts), de remuer le terre (par déférence au fossoyeur). de se marier... Les gars du village se relaient pour sonner un glas ininterrompu durant la nuit: les morts sont sensés revenir sur terre et on laisse volontiers la porte ouverte pour les accueillir.
Le 11 novembre est dédié à Saint Martin. Or, Martin est le nom de l'ours. Cet animal connaît un culte divin très ancien du fait qu'il marche comme un homme, qu'il vit à son voisinage et surtout qu'il séjourne dans les entrailles de la Terre durant l'hiver, précisément à compter de ce jour-là.
Ce saint est très populaire au Moyen Age car il ménage "l'été de la Saint Martin", mais aussi guérit quantité de maux, sauf "le mal de la Saint Martin" qui touche ceux qui ont trop goûté au vin nouveau Il est particulièrement riche en dictons: "Per Sent Martin, l'ivèrn es pel camin" "Sent Martin fa lo blat fin" "Quand Sent Martin ritz, Senta Catarina plora" (Pour Saint Martin, (11/11) l'hiver est en chemin, Saint Martin fait le blé fin, Quand Saint Martin rit, Sainte Catherine pleure)
D'autre part, c'est à cette date que l' on met un terme aux contrats de fermage. Fermiers et métayers déménagent. Ils chargent, sur leurs charrettes, meubles, vaisselle et outils et gagnent leurs nouveaux logis accompagnés de quelques bêtes .
Tout le monde sait qu ' "A la Sainte Catherine, tout prend racine". Mais, de plus, ce 25 novembre, les jeunes filles les plus âgées confectionnent un chapeau dont elles coiffent la statue. Cette coutume a donné naissance à la fête des "Catherinettes" que célèbrent parfois aujourd'hui les célibataires de vingt cinq ans.

NOVEMBRE,
MOIS DE LA CONSCRIPTION

Saint Martin est aussi le patron des armées françaises. Et c'est en novembre que sonne l'heure d'être conscrit. Le service militaire a été rendu obligatoire en 1889. Auparavant, le recrutement s'effectuait par tirage au sort et .les jeunes hommes qui tiraient les plus petits numéros étaient enrolés pour sept ans, ce qui était considéré comme un véritable malheur familial. Si bien que chacun se procure à l'avance une amulette susceptible de conjurer le sort: celui-ci a ramassé à minuit un os au cimetière; celui-là s'est muni de feuilles de glaïeuls; cet autre a récupéré l'aiguille qui a servi à coudre le linceul d'un mort; cet autre encore a apporté un morceau de la délivrance maternelle précisément conservé à cette fin...
Le jour dit, le rassemblement bruyant s'effectue sur la place du chef-lieu de canton. Chaque conscrit se présente en tenue de rigueur: pantalon jaune, habit bleu, chapeau haut de forme agrémenté de rubans offerts par "la Belle" , c'est à dire la fille de son âge à qui il a rendu visite juste avant... Le moment fatidique est là: une dernière prière, une main qui serre l'amulette et l'autre qui plonge dans l'urne qui contient les petits papiers portant chacun un numéro. Celui qui tire le 1 est surnommé "le bidet" et il est promené sur un âne. Celui qui pioche le plus gros est appelé" le laurier" et, comme il est certain de ne pas partir à l'armée, il est condamné à payer à boire. Jusqu'à tard dans la nuit, c'est la fête avec parfois quelques débordements... Dès le lendemain, les fils de bonnes familles désignés pour le service national se préoccupent de trouver un remplaçant. L'argent peut arranger bien des malchances., mais pas toujours cependant. Parfois, curé et instituteur font cause commune pour empêcher le départ d'un pauvre malheureux. Une célèbre chanson ," Lo galant de la Catin" évoque cet épisode en précisant :" Regent, cure e lo sort foguèron los pus forts" ( Instituteur, curé et le sort furent les plus forts)..
La réticence à quitter les siens et son pays pour si longtemps est telle que certains appelés désertent ou se mutilent. Pour ceux qui partent malgré tout, le décompte des jours n'en finit pas... et on imagine combien le temps de la quille est attendu avec impatience. Ce moment est ainsi nommé en référence au nom du bateau qui, autrefois, ramenait les forçats de Cayenne en France.
Le Conseil de Révision qui avait pour but de déclarer apte ou pas au service militaire les jeunes gens de 18 ans se déroulait encore dans la salle du Conseil municipal de notre chef-lieu de canton au milieu des années 1960.

Ainsi s'écoulait l'année, rythmée par les événements rituels .Autrefois, le temps qui passait portait l'empreinte de la religion. Mais nul doute que l'Homme, grâce à son imagination et à sa créativité, savait faire la part du symbolique et du réel...

Enquête de Guy

(d'après "La vie de nos Ancêtres au fil de l'an" de Jeannette Lagarde et "Calendrier et croyances populaires", série d'articles parue dans "Ricochet" n°15).

 
haut de page
page d'accueil   |   Copyright © 2000 Entre-Nous
 


journal | archives | équipe | e-mail | livre d'or | forum | photos
10 ans | cassette vidéo | abonnement | bric-à-brac | aide