La campanièra (la carillonneuse)
Dans
"Mémoires", Raoul Astoul évoque parmi tous les personnages pittoresques
du village autrefois, une figure emblématique : la carillonneuse.
A
chaque église son carillonneur ! A Villebrumier, c'était Génie Allias
qui exerçait cette charge "avec amour". Elle sonnait les cloches chaque
jour pour les Angélus du matin, du midi et du soir, par tous les temps
et même malade. Si leur tintement retentissait en dehors de ces
horaires, chacun cherchait à en connaître le motif : un décès souvent;
ou un baptême qui avait lieu dans les huit jours suivant la naissance,
en petit comité, la fête se déroulant plus tard; ou encore un mariage
qu'on ne célébrait ni le lundi ni le samedi, ce qui aurait obligé à
travailler le dimanche, et surtout pas le vendredi, jour d'abstinence !
Mais la cloche vibrait aussi pour dissiper un orage ou pour rassembler
la population pour combattre un incendie. Génie de Peyres ou Génie
de las campanas n'avait pas d'âge. Elle était toujours vêtue de noir,
avec, en hiver, une mantille enserrant ses cheveux poivre et sel ou, en
été, un grand chapeau de paille. Elle vivait seule et cultivait un
grand jardin situé route de Reyniès. Son apostolat était sa raison de
vivre. En plus des pièces qu'on lui glissait dans sa main à l'occasion
des baptêmes, des mariages et des décès, elle passait de maison en
maison, selon une coutume qui venait de la nuit des temps, les vendredi
et samedi saints, récolter des oeufs qu'elle allait vendre le jeudi
suivant au marché de Fronton. Elle n'avait que ces deux jours de repos
par an, les cloches partant à Rome le jeudi saint à la messe de onze
heures et revenant pour l'Alléluia de la grand'messe de Pâques. Après sa mort, elle fut remplacée par Gayraud puis par Ida Lages jusqu'à l'électrification des cloches en 1960.
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