Une crèche magnifique
Que
l'on soit croyant ou pas, Noël reste une grande fête. Au delà de son
caractère religieux, cette date évoque jouets et cadeaux, mais aussi
sapin, Père Noël et crèche.
Le
sapin de Noël, installé dans la maison et chargé de décorations
chatoyantes et colorées, a fait son apparition en Alsace au XV ème
siècle du côté de Sélestat. "Le Roi des forêts" symbolise la vie à
cause de son feuillage toujours vert qui rappelle la croissance de la
végétation et sa régénération perpétuelles. Mais déjà depuis
l'Antiquité, existait l'usage de branches de conifères clouées aux murs
pour décorer les maisons fin décembre. Le Père Noël est un
personnage relativement récent qui, peu à peu, a pris la place de Saint
Nicolas et de l'Enfant Jésus pour récompenser les enfants sages. C'est
en 1822 qu'un poète américain évoque un vieillard à la petite bedaine
ronde, joufflu et dodu, avec une barbe blanche et un nez qui rappelle
une cerise, portant sur l'épaule un baluchon plein de jouets et qui
arrive et repart par la cheminée… La crèche, sensée reconstituer la
scène de la nativité de Jésus, trouve son origine en 1223, à
l'initiative de Saint François d'Assise qui en créa une vivante. Depuis
lors, la tradition s'est développée, d'abord en Italie avant de gagner
la Provence. Puis, dans toutes les régions, des générations d'enfants
se sont émerveillées en donnant libre cours à leur imagination et à
leur créativité pour réaliser, souvent avec des moyens du bord, des
décors où les santons prennent une place de choix. Les santons
sont des figurines d'argile créées primitivement en Provence. Ils sont
venus se placer auprès des statuettes de plâtre qui représentaient ,
dès le début du XVIII ème siècle, du côté de Marseille, Joseph, Marie,
l'Enfant Jésus, un quarteron d'anges, le bœuf, l'âne et les Rois Mages.
Ces personnages en tenues traditionnelles représentent le peuple de
cette région méditerranéenne avec la présence de l'Arlésienne,
richement vêtue, du couple Grasset et Grassette, du Notaire, symbole de
la petite bourgeoisie. Autour d'eux, prennent place les figures
pittoresques de la vie rurale et artisanale comme bergers, valets de
ferme, meuniers, poissonniers, boulangers, lavandières, raccommodeurs
de faïence, étameurs, vanniers, chasseurs, pêcheurs, porteurs de
fougasses, tous animés des meilleures intentions. Car le monde de la
crèche est celui d'une pastorale douce et tendre, où règnent la
bienveillance et la bonne volonté. A Villebrumier, l'église fut
restaurée en 1960. Or, il n'existait qu'une crèche en fort piteux état.
Par chance, un Marseillais qui rendait souvent visite à l'abbé Jaubert
offrit une série de santons provenant de chez Simone Jougla, un atelier
de fabrication célèbre dont l'estampille apparaît sous le socle. Le don
comportait une trentaine de figurines en terre cuite costumées de
trente centimètres de hauteur parmi lesquelles on distingue le
tamborinaïre, le pêcheur, le meunier portant son sac de farine, le
couple Jaquétou et Margarideta abrité sous le même parasol rouge, les
Arlésiennes mère et fille… Les autres mannequins furent habillés par
Marguerite Vidal, conservateur du musée de Moissac, qui confectionna à
la mode de chez nous chapeaux de paille noirs, foulards de tête, robes
aux larges ourlets, pantalons ou vestes… La création de cette crèche
avec la maison en carton pour la Sainte Famille, celle pour les santons
et le moulin, a mobilisé bien des bonnes volontés au début de l'hiver
1960. Pour compléter l'ensemble, les enfants de chœur ramenaient d'une
journée passée dans les bois la mousse, le gui et le houx nécessaires.
L'éclairage était déclenché par la chute d'une pièce de monnaie dans
l'escarcelle d'un petit ange. Ces réalisations ont servi plusieurs
années et le moulin a été perfectionné puisqu'il s'illuminait
automatiquement et que ses ailes tournaient. Cette œuvre magnifique
méritait bien qu'elle soit filmée par une équipe de FR3 et montrée à un
vaste public lors d'un journal télévisé régional.
D'après les témoignages de l'abbé Jaubert et de Jean Vialard parus dans Entre Nous n° 8
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