Voilà 200 ans... La naissance du Tarn–et-Garonne
C’est le 21 novembre 1808 que Napoléon 1er signe le ‘sénatusconsulte’ qui donne naissance au Tarn-et-Garonne. L’empereur se trouve alors au camp de Burgos en Espagne où il est venu, à la tête de la Grande Armée, imposer la présence de son frère Joseph sur le trône des Bourbons. C’est l’histoire d’une création refusée en 1789
En effet, en 1789, la Constituante choisit Cahors, pourtant de moindre envergure, comme préfecture du Lot, Montauban n’obtenant seulement que la fonction de chef-lieu de district de ce même Lot (comme Lauzerte) alors qu’elle est la troisième ville du Sud-Ouest dotée de pouvoirs considérables tant civils qu’ecclésiastiques et d’une forte activité industrielle et commerciale. Les tentatives de convaincre l’assemblée nationale de revenir sur sa décision sont restées vaines. Ces tractations se passent dans un contexte peu favorable : la ‘Grande peur’ sévit en 1789 et des événements sanglants provoquent, le 10 mai 1790, cinq morts et une dizaine de blessés parmi les Gardes nationaux plutôt protestants lors d’affrontements avec la foule majoritairement catholique. Montauban se trouve isolée dans le Midi et la Constituante dissout la Municipalité qui est alors administrée par des commissaires venus du… Lot. Les mentalités évoluent et en 1804, lors du plébiscite, les notables locaux de l’époque, au premier rang desquels les protestants, se montrent majoritairement favorables à l’établissement de l’Empire. C’est le cas de Joseph-Pierre Viàlètes (dont le père a ajouté à sa branche le nom de Mortarieu). Il appartient à une puissante famille catholique et royaliste, les Vialètes d’Aignan, propriétaire d’une manufacture de cadis florissante qui fabrique des étoffes de draps pour uniformes de soldats, mais aussi des cuirs, des ceintures, des équipements pour les chevaux. Pourtant, l’homme est devenu bonapartiste après l’installation du Consulat et il a représenté le district du Lot dont Montauban est le chef-lieu au sacre de l’Empereur. En 1806, nommé à 38 ans Maire de Montauban, il ambitionne de restituer à sa ville sa grandeur passée. Cette année-là, il rencontre Napoléon à Saint-Cloud où promesse lui est faite d’une visite dans sa localité lors d’un prochain déplacement dans le Midi. Le 16 novembre 1807, le prince archichancelier Jean-Jacques de Cambacérès fait halte à Montauban qui le reçoit fastueusement. En janvier 1808, l’Assemblée communale vote 8.000 francs de subsides en vue des cérémonies d’accueil de Napoléon dont la venue est si espérée. Le 26 juillet 1808, l’Empereur et sa suite sont à Toulouse où Vialètes de Mortarieu se rend pour lui demander audience. Deux jours après, dans la nuit du 28 au 29 juillet, l’Empereur et son escorte arrivent à Montauban. L’entrée de l’agglomération se fait du côté de Bressols, puis a lieu la traversée de la ville jusqu’à l’Hôtel des Intendants où le couple impérial passe la nuit. Le Préfet et le Sous-Préfet du Lot sont présents, les élus locaux ont vêtu leurs habits d’apparat, la ville pavoise, deux arcs de triomphe et des colonnes corinthiennes ont été dressés… Le lendemain, dès 8 heures, l’Empereur effectue une promenade à cheval à travers la commune : la Garde d’honneur parade, les cloches sonnent, les canons tirent, les vivats de la foule résonnent…A 9 heures, se tient une réunion entre Napoléon, ses collaborateurs et les membres du Conseil municipal. L’Empereur promet alors de « mettre Montauban au rang de chef-lieu de département ». A11 tient en tête à tête avec Vialètes de Mortarieu pour examiner les proposition et observer des cartes. A 17 heures, le cortège impérial quitte Montauban pour se rendre à Castelsarrasin et Moissac où Napoléon déclare installer « un pont, une sous-préfecture et un tribunal ». En août et septembre, après que le Ministre de l’Intérieur ait pris connaissance d’une note signée de l’Empereur qui l’enjoint ‘d’ôter 10.000 habitants au Lot et à la Haute-Garonne, 50.000 au Lotet- Garonne et 15.000 au Gers’, l’administration détermine les limites du nouveau département. Le 4 novembre suivant, un ‘sénatusconsulte’ décrète : « Il sera formé un nouveau département dont la ville de Montauban sera le chef-lieu, sous le nom de Tarn-et-Garonne » doté de trois arrondissements avec Moissac et Castelsarrasin comme chefs-lieux et représenté par deux députés. Par ailleurs, Montauban sera « membre des bonnes villes dont les maires assistent au couronnement de l’Empereur ». Mais il faudra attendre le 21 novembre pour qu’il soit paraphé par Napoléon. Les 3.730 km2 de la nouvelle entité empièteront sur ses voisins, essentiellement sur le Lot (arrondissement de Montauban et cantons de Lauzerte, Moissac et Bourg-de-Visa) et la Haute- Garonne (arrondissement de Castelsarrasin où se situe alors le canton de Villebrumier et cantons de Beaumontde- Lomagne, Saint-Nicolas-de-la-Grave et Verdun-sur-Garonne), mais aussi sur le Gers (canton de Lavit-de-Lomagne), sur l’Aveyron, (cantons de Saint-Antonin, Varen et Parisot), et enfin sur le Lot-et- Garonne (cantons de Valence, Auvillar, Lamagistère, Dunes et Castelsagrat), à l’exception, curieusement, du Tarn. Le nouveau département compte alors 221 communes (contre 195 actuellement depuis 1933), 33 cantons, dont celui de Villebrumier (contre 30 aujourd’hui) et 3 arrondissements (celui de Moissac a été supprimé en 1926). Le Tarn-et-Garonne a compté jusqu’à 242.500 habitants en 1846 et en comptabilisait 221.300 en 2005. Dès le 26 novembre 1808, le premier Préfet, Louis, Honoré, Félix Lepelletier d’Aunay, prend ses fonctions. Villebrumier jusque là commune de la Haute-Garonne appartient désormais au département naissant. Mais ce n’est qu’en 1810 que son canton est détaché de l’arrondissement de Castelsarrasin pour rejoindre celui de Montauban.
GUY d’après des documents personnels et l’ouvrage de Janine Garrisson ‘Vialètes de Mortarieu ou l’invention du Tarn-et- Garonne’ édité par le Conseil Général)
|