Le cordier
Lors de la manifestation "Villebrumier An 2000"
qui s'est déroulée en septembre, l'association " Les métiers d'antan
" a présenté des ateliers évoquant de vieux savoirs-faire parmi lesquels le travail des cordiers.
Voici des précisions sur cet artisanat ancestral.
En Egypte, en 1470 avant Jésus Christ, un bas-relief de
Thèbes datant de XVIIIème dynastie, représente des cordiers au travail, ainsi
que des cordes enroulées.
400 ans
avant Jésus Christ, les Grecs s'installent à Marseille. Ils apportent aux
Gaulois trois cultures : l'olivier, la vigne et le chanvre. Cette dernière
culture servira à tresser des fils pour confectionner une corde.
Mais sous
le règne de Louis XIV, Colbert veut donner à la France une marine de guerre
puissante ; or, les marins français de l'époque se plaignent de la mauvaise
qualité ses cordages fabriqués en Hollande. Colbert décide de créer une
Corderie Royale à Rochefort : c'est la première corderie industrielle, pour
faire de la corde et du tissage des voiles de chanvre.
Au début du
XX ème siècle, le cordier fait lui même son fil. Le chanvre est acheté au
paysan qui l'a récolté, l'a roui, c'est à dire l'a trempé dans l'eau pour
détacher les fibres, et l'a broyé pour les séparer. L'hiver, le cordier
pratique le peignage, qui consiste à affiner le chanvre, lui ôter la paille et
passer le chanvre brut sur des dents d'acier. Ensuite, il filera lui-même une
poupée de chanvre placée autour de sa taille maintenue par son tablier, un bout
de feutre à la main. Il va à reculons, lâchant progressivement la quantité de
chanvre nécessaire. Le crochet qui tourne à l'autre extrémité fait le reste.
Avec ces premiers fils, l'artisan va faire sa corde : les mailles sont
allongées entre les crochets et l'émerillon et passent sur des tréteaux qui
servent de relais et de guides. Les crochets se mettent à tourner, la torsion
monte et sous la tension le traîneau glisse vers l'avant, un homme juché dessus
fait contre-poids. Quand la torsion est suffisante, le cordier arrête les
crochets, débloque l'émerillon et avec le couchoir introduit entre les mailles,
il se déplace comme l'éclair. En un clin d'œil, le regard fixé devant lui, le
cordier fait l'assemblage des fils des torons tordus ensemble pour former un
cordage. Il ne reste plus qu'à terminer la corde en faisant un œillet puis un
anneau de fixation. Quand il s'agit de longues cordes, le cordier fait des
épissures.
Au début du
XXème siècle, on fabrique des cordes de toutes sortes : longes et guides de
toutes longueurs, ficelles pour l'usage courant et d'autres destinées à
soutenir les poids des pendules anciennes.
L'apparition
du câble d'acier a causé la disparition des cordiers pour la marine. L'arrivée
des tracteurs a entraîné la fin de la confection des guides pour le bétail.
Pendant la
guerre 39/45, suite à la pénurie des matières premières, on confectionne de la
ficelle en papier mâché. A partir de 1946, l'industrie de la corde utilise le
sisal, l'alpha ou le nylon. Actuellement, tout est industrialisé, de nouveaux
composants de crins, de fils textiles et métalliques sont utilisés.
Expressions du langage courant
Le langage
courant utilise des expressions constituées à partir du mot " corde
" de sac et de corde ; tu ne vaux
pas la corde pour te pendre ; tirer sur la corde ; avoir plusieurs cordes à son
arc ; se passer la corde au cou ; usé jusqu'à la corde ; toucher la corde
sensible ; être sur la corde raide ; il pleut, il tombe des cordes ; tenir la
corde ; prendre un virage à la corde ; mériter la corde ; ce n'est pas dans mes
cordes.
Termes techniques utilisés en corderie
couchoir : pièce de bois de forme conique comportant autant
de rainures que de mailles désirées, avec laquelle le cordier tresse la corde
en avançant . Un trou central permet le passage de l'âme (maille placée au
centre des grosses cordes).
émerillon : crochet placé derrière le cordier à l'autre bout
de la corde, soutenu par une simple barre de fer avec un contre-poids pour les
petites cordes. Pour les grandes, il est fixé au traîneau. Débloqué, il tourne
librement lors du tissage.
carret ou traîneau de bois : pièce à laquelle l'émerillon
est fixé. Utilisé pour les longues cordes, il est tiré par la torsion. Le
cordier et ses acolytes montent dessus pour faire contre-poids.
épissoires : cornes ou pièces de bois qui servent à faire
les épissures qui nouent les cordes entre elles.
Yves
(d'après "Connaissances du pays d'Oc")
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